Classes de 2nde à champ professionnel : le rapport de l’IGEN publié (trop) tard !

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Un rapport de mars 2018 (voir en PJ) au sujet des secondes à champ professionnel vient d’être publié bien tardivement alors que les secondes dites à « familles de métiers » font l’actualité. Ces expérimentations et l’analyse de l’inspection générale revêtent un intérêt tout particulier alors que 3 familles de métiers seront déjà mises en œuvre à la rentrée 2019.
 

Un certain nombre d’académies ont fait le choix ces dernières années de créer des classes de seconde à champs professionnels donc communes à plusieurs spécialités ou à plusieurs options. Les élèves découvrent les caractéristiques de ces spécialités ou options, les métiers associés avant de se déterminer pour une orientation définitive, en cours d’année ou à la fin de la classe de seconde.

L’Inspection générale de l'Éducation nationale (IGEN) note que « ces expérimentations sont en général initiées et portées par des équipes pédagogiques et de direction motivées. Elles entrainent une forte mobilisation en temps des uns et des autres, et les résultats semblent à la hauteur de leurs espérances. »

Elle précise que « les périodes de détermination sont en général plus réduites dans le domaine industriel que dans le domaine tertiaire, où elles sont rarement inférieures à l’année pleine. »

Cette nécessité semble moins impérieuse dans les spécialités tertiaires, où les enseignants mettent plutôt en avant l’acquisition de comportements professionnels qui peuvent être largement transversaux.

L’IGEN remarque que « la perte de professionnalisation est une inquiétude récurrente, à la fois chez les enseignants des matières industrielles et chez les directeurs délégués à la formation, inquiétude qui freine la mise en place ou l’extension du dispositif. »

Pour l’IGEN, cela pourrait provenir de « la crainte d’une perte d’identité des enseignants attachés à une vision plus traditionnelle de la formation et du métier », mais précise « que la dimension professionnalisante des formations est un enjeu régulièrement rappelé par les branches professionnelles industrielles dans le cadre d’instances ministérielles »

Les rapporteurs reconnaissent cependant in fine qu’il serait nécessaire de créer des formations complémentaires post-baccalauréat (BTS, mentions complémentaires, FCIL ou même des titres et des certifications complémentaires) pour pallier la réduction des perspectives d’insertion professionnelle immédiates liée à la diminution des temps d’apprentissage.

Pour l’IGEN, les conditions de succès de ces expérimentations sont notamment identifiées par :

  • Une forte mobilisation des équipes pédagogiques, avec une grande entente entre les professeurs de l’enseignement professionnel, mais aussi de l’enseignement général.
  • Une mise en œuvre d’une pédagogie active, en général une démarche de projet,
  • Une réflexion d’ingénierie pédagogique, associant enseignement professionnel et enseignement général, à partir des référentiels des diplômes afin de faire émerger des compétences communes ou complémentaires entre les différents baccalauréats professionnels concernés.

L’IGEN plébiscite un modèle fondé sur une approche intégrée des référentiels qui permet d’identifier les compétences communes et les complémentarités entre les différentes spécialités. Les rapporteurs précisent que « ce modèle nécessite un travail d’équipe puissant, des temps de concertation élevés entre les enseignants et une réflexion plus poussée sur la découverte de chaque spécialité et des métiers associés. »

Le modèle dit « intégré » évoqué par l’IGEN est celui retenu par le ministère pour la mise en œuvre des « secondes familles de métiers ». Trois d’entre elles vont être mise en œuvre à la rentrée 2019 pour une généralisation des 11 familles restantes en 2020 et 2021.

Au regard du rapport, cette perspective est d’autant plus inquiétante. Les conditions de réussite de ces expérimentations sont multiples et très exigeantes : forte motivation des équipes pédagogiques et de direction, travail d’équipe dense et temps de concertation élevé. La problématique de déprofessionnalisation est bien réelle particulièrement pour les formations industrielles, et l’impact sur l’insertion professionnelle post bac aussi.

Pour le SE-Unsa, l’injonction et la généralisation en matière pédagogique ne sont pas souhaitables car inefficaces et sources de tensions importantes dans les équipes. Equipes qui vont être impactées par les multiples chantiers de la réforme de la voie professionnelle. Il est urgent de mettre fin à cette précipitation, de prendre le temps de procéder à une évaluation sérieuse des premières mises en œuvre de familles de métiers avant d’envisager toute généralisation.

Les situations proposées dans les guides pédagogiques d’accompagnement déjà disponibles sur le site éduscol montrent toute la complexité du travail à mener dans les équipes. L’accompagnement de ce travail ne peut pas se limiter à ces documents car l’ingénierie pédagogique à mettre en œuvre est très lourde.
Le SE-Unsa juge que sans temps de concertation identifiés et sans reconnaissance de l’investissement exigé, ces secondes en familles de métiers ne seront pas viables.
Pour le SE-Unsa, cette nouvelle organisation devra faire ses preuves avant d’envisager toute extension.