Le ministre Pap Ndiaye vient d’annoncer le retour des mathématiques dans le tronc commun pour les élèves ne suivant pas l’enseignement de spécialité, contre l’avis unanime des organisations syndicales dont le SE-Unsa. C’est un mauvais choix allant à rebours de ce que le SE-Unsa porte sur les mathématiques.
Retour en arrière
Le feuilleton de la place des mathématiques au lycée GT n’en finit définitivement plus. Absent du tronc commun en 1ère et en terminale dès la mise en place de la réforme, les alertes de la communauté scientifique et des universitaires entre autres sur le potentiel appauvrissement du futur vivier d’étudiants scientifiques se sont succédées ces derniers temps.
Le SE-Unsa a pointé régulièrement le faible nombre de filles ou d’élèves de catégories moins favorisées qui osaient se tourner vers les mathématiques. Le gouvernement est donc revenu bien tardivement sur la place des maths dans la réforme au lycée.
En effet, depuis septembre, les élèves ne suivant pas l’enseignement de spécialité en 1e et souhaitant faire des mathématiques suivent de façon volontaire un enseignement renforcé d’1h30 de mathématiques.
Ce dispositif deviendra finalement la norme à partir de la rentrée 2023.
Pour la rentrée 2023…
La future place des mathématiques en 1ère interroge… le but du tronc commun est d’avoir des disciplines suivies par l’ensemble des élèves : c’est le cas de l’anglais, du français, de l’histoire-géographie ou encore de l’EPS.
Il est possible pour les lycéens d’approfondir ces disciplines par le choix, s’il existe dans l’établissement, de son enseignement de spécialité.
Pour les mathématiques, ce ne sera pas possible puisque les élèves auront soit des mathématiques au tronc commun, soit un enseignement de spécialité… le tronc commun au lycée ne sera donc plus tout à fait commun.
Pour le SE-Unsa, la demande était depuis longtemps un rétablissement des mathématiques pour tous les élèves afin de parfaire la culture scientifique des lycéens et de leur laisser le choix d’approfondir ou non leurs connaissances par le choix d’un enseignement de spécialité. La tendance très forte des filles à délaisser les enseignements scientifiques dont les mathématiques ne se trouve pas réglée par une telle mesure, loin de là. Au contraire, une telle organisation transmet une vision punitive des mathématiques : « si tu ne choisis pas l’enseignement de spécialité maths, tu feras quand même des maths ! » et distingue les élèves en deux catégories : les bons élèves en spécialité et les autres suivant les mathématiques du tronc commun.
Les filles, qui généralement minimisent leurs capacités, pourraient même se détourner de la spécialité mathématiques en se contentant de l’enseignement de tronc commun qui leur semblerait suffisant.
Des changements au-delà de la 1ère
Le bricolage de la réforme du lycée n’en finit donc plus et les éternels revirements et changements se poursuivent. Sur les mathématiques, le dossier est loin d’être clos.
En effet, les mesures annoncées dans la presse par le ministre vont au-delà de la simple classe de première puisque c’est bien la place des mathématiques qui est au centre de sa prise de parole. Un module horaire de réconciliation en seconde, des modules de consolidation et de renforcement au collège…, l’année 2023 sera donc l’année des mathématiques pour les élèves mais aussi d’un alourdissement substantiel de leur emploi du temps.
Espérons au moins que ces modifications se traduisent par un recrutement conséquent d’enseignants pour mettre en œuvre ces dispositifs. Le scepticisme domine à l’heure où le nombre de candidats inscrit au Capes maths est en chute libre.
Du reste, les annonces du ministre faites à la presse restent peu détaillées et appellent clarification et précision.
L’avis du SE-Unsa
Le SE-Unsa regrette une nouvelle fois la mise en œuvre précipitée de cet ènième changement. L’intégration des mathématiques dans le tronc commun à la rentrée 2023 est bien nécessaire pour contrer les effets négatifs constatés de la réforme du lycée sur cette discipline, dont notamment la désaffection des élèves pour les mathématiques, en particulier des filles.
Toutefois, le SE-Unsa appelait à une véritable réflexion plus large sur la place des mathématiques au lycée général, pour préparer les lycéens à leur poursuite d’études post-bac dans les meilleures conditions.
De plus, un remaniement des programmes de mathématiques devient urgent, afin de les mettre en cohérence selon les niveaux, les options maths complémentaires et expertes, le tronc commun, mais aussi dans le souci d’une meilleure articulation avec le programme de troisième.
Pour le SE-Unsa, le ministre devrait choisir la méthode réflexion-concertation plutôt que la méthode précipitation-bricolage.