La technologie est un enseignement dont on entend peu parler dans notre système éducatif.
Et pourtant…
La construction d’une économie durable où on produit, où on fabrique, où on conçoit autrement, cela s’apprend en cours de technologie. Cette discipline est capitale car elle apporte des compétences utiles pour tous les autres enseignements et joue également un rôle important en matière d’orientation des élèves, de connaissance des métiers, et pour valoriser les filières technologiques, industrielles, numériques, qui resteraient sinon peu connues des élèves. L’initiation à la culture du numérique, qui occupe dorénavant une place centrale dans notre société, est un enjeu transversal du système éducatif et des enseignements et c’est en technologie et au collège que les élèves pourront le mieux s’en imprégner, notamment pour apprendre à programmer. Une culture technologique est un facteur plus qu’important pour l’employabilité de nos élèves, et ce, quel que soit le domaine et le niveau dans lesquels ils construiront leur avenir.
Sa place est donc centrale pour penser le système éducatif de demain, le rapport que les futurs citoyens entretiennent avec l’innovation technologique, l’utilisation des ressources de la planète, le low tech, les choix faits pour les infrastructures et l’industrie, pour des modes de transports, d’énergie et de construction durables… Et pourtant, cet enjeu crucial pour l’avenir de la planète, dans un monde où la crise climatique est de plus en plus présente dans nos vies, n’occupe qu’une place ridiculement modeste dans les horaires, les programmes et dans la vie des établissements.
Cela doit changer.
Les évolutions, voire les révolutions, technologiques ne peuvent être initiées sans culture technologique. Les projets d’établissements et les projets pluri-disciplinaires intégrant la technologie permettent l’ouverture sur le monde, le rapport au concret, au matériel, aux objets. Ils doivent être plus présents à tous les niveaux de tous nos établissements.
La discipline technologie est apparue dans les années 70 au collège, et sous forme des sciences industrielles de l’ingénieur au lycée, en parallèle de la création du bac technologique et de l’essor des BTS et des IUT.
Aujourd’hui plus de 11 000 enseignant·es assurent cet enseignement.
Mais le concours de recrutement peine à attirer des candidat·es. 238 postes étaient offerts en 2020 au Capet sciences industrielles de l’ingénieur, créé en 2013, mais seuls 336 candidat·es se sont présenté·es aux épreuves. Les conditions de travail souvent compliquées du fait de manque de matériels adaptés, de moyens (groupes allégés et budget) et de formation adaptée, les postes partagés entre plusieurs collèges, le sentiment de dévalorisation au sein des établissements, les difficultés pour obtenir un poste dans une autre académie expliquent cette désaffection. D’autre part, la condition bac+5 pour accéder aux concours et les faibles rémunérations des enseignants font que les étudiants ingénieurs préfèrent se tourner vers l’industrie, plus lucrative.
Pour donner une nouvelle place à l’enseignement de technologie, il faut évidemment soutenir et sécuriser les personnels concernés, en gérant leur carrière selon des modalités identiques à celles des autres disciplines. Une façon de favoriser l’attractivité de son concours de recrutement serait d’inscrire cette discipline dans celles qui bénéficient d’un dispositif de pré-recrutement (avec les mathématiques, le français et l’allemand).
Les nouvelles constructions ou rénovations mises en œuvre par les collectivités territoriales ne prévoient pas souvent l’aménagement de locaux adaptés à cet enseignement. Or, rendre attractif cet enseignement, c’est aussi lui permettre de mener des projets ambitieux, en investissant dans des équipements, comme les maquettes, le matériel de robotique ou les imprimantes 3D. Cela peut être réalisé sur un budget équivalent à celui de l’ensemble des autres disciplines qui, elles, bénéficient d’un budget pédagogique destiné aux ouvrages scolaires. Pour cela, différents moyens doivent être débloqués en mobilisant différents financeurs.
Alors que 20 % seulement des élèves s’orientent en première et en terminale dans les séries technologiques du lycée, la classe de seconde pourrait vraiment être générale ET technologique afin de rendre possibles toutes les orientations.
L’enseignement de sciences numériques et technologie, qui a été créé en 2019, aurait pu être une initiation à la pédagogie de projet portée par les séries technologiques. Elle aurait pu rendre ces filières plus attractives pour les élèves. Ce n’est pas le cas aujourd’hui puisque son enseignement n’est assuré que rarement par des professeurs de technologie.
Les programmes de cet enseignement pourraient donc être revus pour faire de l’orientation vers le bac technologique un choix positif.
C’est seulement grâce à la technologie que l’École donnera toutes les clés aux citoyen·nes de demain pour s’adapter au monde à venir et gérer ses ressources de manière durable.