Plan filles-maths : une priorité nationale maltraitée par une consigne ministérielle irréaliste

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La consigne adressée aux directeurs et directrices d’école à travers le plan ministériel « Faire des maths et des sciences un choix possible pour toutes » rate largement sa cible. Si l’accès des filles aux filières scientifiques constitue un enjeu majeur de justice sociale et d’égalité des chances, encore faut-il que cette ambition se traduise par une véritable politique publique, avec des moyens adaptés.
 
 
Un transfert de mission inacceptable
 
Sous couvert de « sensibilisation », le ministère demande aux directeurs et directrices d’organiser, au sein de leur école, une séance de travail collective avec leurs collègues, à l’appui d’un diaporama ministériel constitué de données et de consignes pour des ateliers.
En réalité, il ne s’agit pas d’information, mais d’une formation imposée sans intervention de formateurs. La formation des personnels n’entre pas dans les missions des directeurs d’école. Leur demander de la réaliser est une dérive préoccupante qui tend à se répéter depuis quelques temps avec la succession de nouveaux programmes et de plans divers.
>> Lire notre article : Piloter n’est pas former 
 
 
Une injonction sans formation préalable

Il n’y a eu aucune formation institutionnelle, ni initiale ni continue, qui prépare les enseignant·es à travailler collectivement sur cette problématique pourtant essentielle. Or, on ne s’improvise pas spécialiste des biais de genre en éducation. Avant de pouvoir proposer des « solutions », l’accompagnement par des formateurs et des formatrices permet une prise de conscience des biais sociétaux que nous avons tous et toutes intériorisés. Ce serait tout l’enjeu d’une véritable formation professionnelle, menée par des formateurs, pour pouvoir ensuite être en capacité d’ajuster les pratiques à long terme.
 
 
Un support indigeste et déconnecté du terrain

Le diaporama mis à disposition est présenté comme « modifiable », mais il est surtout extrêmement lourd et peu adapté à un usage concret en équipe. Au lieu de donner des ressources pédagogiques utilisables pour piloter, élaborer une stratégie d’école, il place les directeurs et directrices dans une position impossible : devoir aborder un sujet complexe sans y avoir eux-mêmes été formés. De plus, même pour la partie informative qui pourrait les concerner, l’injonction d’organiser ce travail dans un calendrier si contraint risque d’alourdir la charge de travail des directeurs et directrices d’école et de générer des tensions au sein des collectifs.
 
 
Un leurre inefficace
 
Faire porter sur les épaules des directeurs et directrices la responsabilité d’une telle pseudo-formation ne permettra pas de faire progresser l’égalité filles-garçons dans les filières scientifiques. Cela donne l’illusion d’une action, mais cela ne règlera rien. Au contraire, cela risque de décrédibiliser une question pourtant essentielle, tout en entretenant la lassitude de se sentir abandonné à son sort lorsqu’il s’agit d’autre chose que de savoirs fondamentaux.
 
 
L’égalité filles-garçons mérite mieux
 
La question de l’accès des filles aux filières scientifiques mérite une vraie politique éducative nationale :
 
  • une formation initiale et continue ambitieuse des enseignant·es par des formateurs et formatrices,
  • des ressources pédagogiques conçues par des spécialistes et testées en classe,
  • des directives qui ne reposent pas sur une simple transmission descendante mais sur un accompagnement progressif de chacun des membres de l’équipe à des moments réservés.
 
Le SE-Unsa le redit avec force : l’égalité filles-garçons ne se décrète pas par circulaire. Elle se construit par la formation, dans un temps dédié, par des moyens concrets et dans le respect des missions de chacun. C’est aussi un des enjeux de l’alerte sociale déposée à la rentrée 2025 par le SE-Unsa autour de la direction d’école.