Repérer et orienter les élèves en situation de souffrance psychique : quel rôle pour les PsyEN ?

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Un tout récent vademecum (en pièce jointe ci-dessous) vient d’être adressé aux DASEN et Recteurs, concernant le repérage et la prise en charge des enfants et adolescents en souffrance psychique. Ce guide, destiné à l’usage de tous les personnels de l’Éducation nationale, ne prend pas suffisamment en compte les compétences des PsyEN et confie certaines de leurs missions à d’autres professionnels.
 
 
Un document au goût amer
 
Au-delà d’une introduction réductrice d’une école bienveillante qui permettrait la réussite scolaire(1), ce document ne manque pas de laisser un goût amer. En effet, la prédominance du rôle des médecins scolaires illustre ce guide à l’intention des personnels de l’Éducation nationale. Si l’équipe éducative pluri-professionnelle est bien mentionnée dans ce document, s’il est rappelé que les psychologues n’appartiennent pas aux personnels de santé, c’est au médecin scolaire de rencontrer l’élève en souffrance : « Au sein des établissements scolaires, la rencontre avec un enfant ou un adolescent qui souhaite « parler de ses problèmes » doit permettre à la personne qui le reçoit en première intention (infirmier, assistant de service social, psychologue…) d’apprécier autant que possible ce qui relève du développement et du pathologique, dans l’optique d’envisager la pertinence d’une rencontre avec le médecin ».

Par ailleurs, il est suggéré aux adolescents décrocheurs de rencontrer l’assistant de service social ou un personnel de santé de l’établissement ! Evidemment, s’il ne fréquente plus l’établissement et si le CIO(2) de son secteur a été supprimé, il sera beaucoup plus difficile de lui apporter de l’aide…
 
 
Une méconnaissance des missions et compétences des PsyEN
 
S’il appartient bien aux médecins d’établir (le cas échéant) un diagnostic, apporter un éclairage sur les aspects cognitifs et affectifs d’un enfant/adolescent en difficulté scolaire relève des missions des PsyEN(3). Pourtant, « [l’enseignant] propose [aux parents] que l’enfant rencontre la psychologue scolaire(4) ainsi que le médecin scolaire afin de compléter l’évaluation des difficultés de l’enfant. Le médecin scolaire apportera son éclairage à la fois sur les aspects cognitifs et affectifs ». Même si, dans certaines académies, les médecins scolaires ont reçu la formation à la WISC 5 que les PsyEN réclament encore, le fonctionnement cognitif (notamment) est de la compétence du psychologue.
 
De même, « L’évaluation par le psychologue scolaire et la consultation du médecin scolaire sont donc très importantes car elles permettent d’explorer les représentations qu’a l’enfant de lui-même, sa confiance en lui, son plaisir à apprendre, son vécu d’échec, son vécu d’incompétence, son sentiment de décevoir l’enseignant, ses parents, son angoisse face aux évaluations, ses réactions émotionnelles (pleurs, tristesse, indifférence…) ». Les psychologues ont bénéficié d’une formation de cinq ans leur octroyant un titre qui réglemente cette profession et leur conférant les compétences pour explorer les champs du psychisme de l’enfant/l’adolescent. Les études en médecine générale, en revanche, ne comprennent qu’un volume horaire de 25 heures dédiées à la psychologie et à la psychopathologie (enfant et adulte).
 
 
Une prévalence du médical
 
Si les amendements relatifs à un service de santé dans lequel les PsyEN seraient sous la tutelle des médecins scolaires n’ont pas été adoptés par les députés examinant la loi « confiance », il n’en demeure pas moins que ces derniers sont identifiés dans ce vademecum comme experts de la souffrance psychique des enfants et des adolescents, laissant le soin aux autres professions (enseignants, CPE, assistant·e·s de service social, PsyEN…) de recueillir les informations leur permettant de définir l’aide la plus adaptée.
Au-delà du partenariat indispensable, c’est bien une prévalence du médical qui se dessine.
 
Ce guide, loin d’être exhaustif, distingue les souffrances inhérentes à l’enfance de celles qui seraient propres à l’adolescence. Ainsi, il n’est pas fait mention d’enfants qui tiendraient des propos suicidaires ou d’adolescents en difficulté d’apprentissage. Si l’étiologie de ces troubles est différente selon l’âge, ne pas les mentionner les minimise.
 
 
Un vademecum rédigé sans les PsyEN
 
Il est bien entendu légitime de se demander qui a participé à la rédaction de ce vademecum : évidemment, aucun PsyEN n’y a été associé. En l’absence de représentants de la profession à tous les niveaux de l’organigramme institutionnel, le système éducatif continuera à souffrir du manque d’apports de la psychologie à tous les niveaux d’analyse, d’impulsion et de décision.
 
C’est pourquoi le SE-Unsa revendique une chaîne fonctionnelle complète du ministère aux académies assurant la représentation de la psychologie à tous les niveaux.
 
(1) Pour le SE-Unsa, l’école est un lieu d’émancipation, qui doit permettre de construire un projet d’avenir et de devenir un citoyen éclairé.
(2) Aucune mention des CIO dans le document…
(3) https://www.education.gouv.fr/bo/17/Hebdo18/MENE1712350C.htm?cid_bo=115951 : cette circulaire, définissant les missions des PsyEN, ne figure pas dans la liste des textes réglementaires en annexe.
(4) Oui, psychologue scolaire ! 
 
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