Lancées en mars dernier, les concertations des Assises de la santé scolaire se sont conclues le 14 mai. La ministre de l’Éducation nationale a tenu un discours très attendu dans l’objectif de placer les questions de la santé et du bien-être à l’École au cœur des priorités de la politique éducative. Une première étape qui vise à inscrire durablement la santé au cœur de l’École pour permettre à chaque élève de grandir, de s’épanouir, de comprendre le monde qui l’entoure, de se comprendre, d’apprendre, de réussir, de s’émanciper et devenir un citoyen éclairé.
La santé des enfants, un élément de réussite scolaire
Ces Assises s’inscrivent dans la continuité des Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant qui se sont tenues en 2024 et qui ont montré la nécessité d’aborder la santé scolaire dans son ensemble, afin de garantir des accompagnements et des prises en charge les plus adaptés aux enfants qui en ont besoin, et cela afin d’œuvrer à l’épanouissement et à la réussite scolaire de tous et toutes !
La santé est une condition de la réussite des élèves mais face à l’augmentation des troubles psychiques, aux inégalités persistantes d’accès aux soins, d’accès à des accompagnements en matière de protection de l’enfance, la santé scolaire s’est imposée comme un enjeu de société. Elle nécessite donc la mise en place d’une politique de santé à l’École, coordonnée et adaptée aux besoins.
Cependant l’École ne peut pas tout et ne pourra continuer à compenser les renoncements d’autres politiques publiques. Penser la santé des élèves, c’est penser et agir pour la prévention, pour des accompagnements de proximité dans la continuité avec des personnels de l’Éducation nationale dont c’est le métier, pour la promotion de la santé de qualité et cohérente, en partenariat avec les services de soins et de protection de l’enfance.
Les principales annonces
Les Assises de la santé scolaire ont permis de faire un point d’étape, d’identifier les axes prioritaires pour une santé scolaire en adéquation et à la hauteur des besoins des élèves et, in fine, de présenter les premiers engagements du ministère de l’Éducation nationale :
Agir pour la santé, le bien-être des élèves et la protection de l’enfance
- Prévention - Détection - Promotion de la santé : recentrer les personnels sur leur cœur de métier en allégeant les charges administratives.
- Détecter dès le plus jeune âge : 100 % des élèves doivent bénéficier d’une analyse personnalisée de leur situation de santé.
- Garantir une prise en charge plus efficace : faire alliance avec les partenaires de l’École.
Agir tous ensemble en faveur de la santé mentale
> Mieux détecter et prendre en charge :
- Systématiser les protocoles dédiés à la santé mentale dans toutes les écoles, les collèges et les lycées d’ici fin 2025.
- Former à la santé mentale les inspecteurs du 1er degré et les personnels de direction.
- Former deux personnels repères en santé mentale dans chaque circonscription pour le 1er degré et dans tous les collèges et les lycées d’ici la fin de l’année scolaire 2025-2026.
- Développer le partenariat avec les maisons des adolescents.
- Organiser un système de coupe-files pour faciliter l’accès des élèves aux centres médico-psychologiques (CMP).
> Renforcer l’appui aux équipes éducatives :
- Nommer 100 psychologues de l’Éducation nationale conseillers techniques (PsyEN CT) en santé mentale - un dans chaque département - identifiés au sein de pôles départementaux Santé, bien-être et protection de l’enfance.
- Renforcer la formation des personnels sociaux et de santé en faveur de la santé mentale.
> Sensibiliser et prévenir :
- Renforcer les compétences psycho-sociales des élèves pour agir sur le climat scolaire et le bien-être des élèves.
- Généraliser le déploiement d’un module de sensibilisation auprès des lycéens et expérimenter son déploiement auprès des collégiens.
Ces annonces s’accompagnent de la volonté de la ministre de renforcer les effectifs, médecins, infirmiers, assistants de service social et psychologues de l’Éducation nationale.
La création de PsyEN conseillers techniques, une avancée importante
Pour le SE-Unsa, la création de pôles départementaux Santé, bien-être et protection de l’enfance avec un PsyEN conseiller technique (PsyEN CT) pourrait répondre à sa revendication d’avoir notamment pour les PsyEN EDA, exerçant dans le 1er degré, un interlocuteur privilégié, de proximité et connaissant leurs missions, leurs spécificités, code de déontologie et leurs conditions d’exercice.
Concernant ce conseiller technique, le SE-Unsa rappelle que ses missions et/ou sa fiche de poste doivent répondre aux besoins des élèves, des PsyEN, et des équipes éducatives. Ses misssions doivent s’étendre au-delà du champ de la santé mentale afin de ne pas empêcher cette possibilité de structuration et de coordinations des actions ainsi que la réflexion autour des politiques éducatives. Dénommer ce nouveau poste PsyEN CT nous semble suffisant et indispensable à la visibilité des missions qui doivent lui être attribuées.
Le pôle santé-Psycho-social départemental doit se placer en soutien aux équipes, être un espace de mutualisations, d’analyses et de réflexions pour les différents corps exerçant en proximité des élèves. Il doit donc l’être dans le cadre d’un travail collaboratif qui respecte les cadres d’exercice de chacun, les spécificités, expertises et prérogatives, les codes de déontologie et la confidentialité. En aucun cas un espace soumis à des liens de hiérarchie qui irait à contre-sens de ses objectifs.
Dans la même logique, le SE-Unsa souhaite la garantie que le travail de ce psychologue CT ait lieu dans le respect de la spécificité, des expériences, connaissances et expertises des psychologues sur le terrain, dans un partenariat constructif entre pairs, et non selon des liens hiérarchiques entre ce PsyEN CT et les psychologues en proximité des équipes éducatives et au plus près des besoins des élèves.
Afin d’assurer équité et transparence, le SE-Unsa demande que les nominations par les Dasen de ces PsyEN CT aient lieu avec un appel à candidature, et une description claire et en cohérence avec les attendus du poste.
La création des pôles santé-psycho-social départementaux ne doit pas se faire au détriment de la présence des PsyEN dans les écoles et les établissements. Ils doivent pouvoir continuer à travailler en lien étroit avec les équipes, les élèves et les familles ainsi qu’avec les réseaux de soins et de services sociaux.
Le SE-Unsa sera particulièrement vigilant à ce que ces recrutements ne se fassent pas à moyens constants afin de ne pas dégrader encore plus les conditions de travail des PsyEN dans les écoles et établissements.
Pour éviter les glissements de toutes sortes, les surcharges de travail, les sorties de cadre aussi, les confusions de places, de fonctions et de missions, si le SE-Unsa soutient le renforcement des effectifs de professionnels santé-psycho-sociaux afin d’être au plus près des enjeux de santé scolaire et de santé mentale, il s’oppose à l’empilement des missions des enseignants pour compenser les manques, pour compenser ce qui ne peut l’être que par des professionnels dont c’est le métier, médecins, infirmiers, assistants de service social et PsyEN.
L’avis du SE-Unsa
Si le SE-Unsa ne peut que saluer la reconnaissance et l’importance de la place, de la fonction et du rôle des PsyEN au cours de ses Assises de la santé scolaire, il ne saurait se contenter d’annonces.
Pour une mise en œuvre en adéquation et à la hauteur des enjeux, le SE-Unsa réaffirme et réaffirmera avec force et constance la nécessité de moyens humains, de respect des besoins des élèves, des missions de chacun, et de l’incontournable travail en équipe dans la continuité et en proximité.
Renforcer les effectifs de PsyEN et augmenter les postes offerts au concours impliquent une réelle politique d’amélioration de leurs conditions de travail ainsi que l’élaboration et la mise en place d’actions claires et concrètes concernant l’attractivité du métier.
Ce n’est pas seulement le nombre de postes qu’il faut augmenter mais aussi la rémunération des PsyEN. Il s’agit également d’améliorer leurs conditions de travail (secteur d’intervention, frais de déplacement, respect de leur spécificité et expertise, de leur code de déontologie, respect de toutes leurs missions, formation, remplacements...) et de leur permettre un meilleur déroulé de carrière (accès à la hors-classe et à la classe exceptionnelle) et des perspectives de mobilités professionnelles (passage de PsyEN EDA à EDO, postes à profil de PsyEN CT).
La volonté annoncée d’une refondation ambitieuse du système de santé scolaire et de renforcer les effectifs - notamment ceux des PsyEN - ne pourra faire l’impasse sur ces actions incontournables et très attendues par la profession. Sans cela, il est fort à craindre que les annonces de la ministre restent des mots et n’accentuent une dégradation déjà en cours de la santé des enfants et des adolescents, avec pour corolaire des actualités tragiques.
Les enfants et les adolescents méritent que nous soyons au rendez-vous de leurs besoins. C’est pourquoi ces annonces doivent être suivies d’actions fortes, cohérentes et coordonnées qui s’inscrivent dans la continuité et en proximité des élèves, des familles, des équipes éducatives et des différents partenaires.
Des actions qui doivent passer par le recrutement de professionnels en nombre et formés. Car aucune mission supplémentaire, aucune formation à la marge, aucun nouveau dispositif, ne saurait se substituer à l’expertise des PsyEN, des assistants de service sociaux, des infirmiers, et des médecins scolaires en matière de santé scolaire et de santé mentale.