Modèle de l’apprentissage en lycée professionnel : un accord perdant-perdant

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La voie professionnelle a fait furtivement la une de l’actualité, le temps de la campagne présidentielle. Depuis, plus aucune information à propos d’une réforme supposée d’ampleur. Le président Macron avait pourtant lancé une idée aussi approximative qu’inquiétante…
 
 
La TVP, une réforme oubliée par ses propres créateurs ?
 
La transformation de la voie professionnelle a bouleversé les habitudes de travail des PLP et a complexifié de manière significative l’organisation des services.
Le poids de l’interdisciplinarité, l’empilement des dispositifs tels que le chef-d’œuvre ou la co-intervention ont rendu les conditions de travail plus difficiles et ont conduit à une véritable perte de sens, à l’opposé même des objectifs affichés de la réforme.
En proposant une nouvelle réforme d’ampleur avant même la mise en place complète de la réforme actuelle, le président a montré toute l’étendue de sa méconnaissance et de son désintérêt de la voie professionnelle.
Nous continuons à digérer cette transformation avec ses contraintes et la charge de travail afférente. Aucune évaluation n’a été effectuée ni n’est envisagée à moyen ou long terme.
Malgré les avancées des comités de suivi nationaux, force est de constater que la déclinaison de la réforme sur le terrain demeure problématique.
 
 
Une charge de travail alourdie
 
Concrètement, dans de nombreuses académies, faute de moyens adaptés, trop d’établissements continuent à envisager le chef-d’œuvre comme un projet sous l’unique responsabilité de l’enseignement professionnel. Alors même que le ministère pousse à l’ouverture progressive sur un maximum de disciplines, les collègues de lettres-histoire, en premier lieu, n’ont pas toujours leur place dans un projet pourtant à visée pluridisciplinaire.
Pas facile alors dans ces conditions de construire une démarche conforme aux attentes de l’examen. Ce dernier se révèle d’ailleurs difficile à mettre en place au regard de l’organisation des épreuves dans de nombreux lycées.
Effectivement, à l’instar des épreuves de langue par exemple, les passations d’oral de chef-d’œuvre cumulées au maintien d’un maximum de cours pour les enseignants membres de jury alourdissent considérablement la tâche des PLP.
 
 
Des défis cruciaux sans cadre stabilisateur
 
De plus, la mise en place des modules de terminale connait une grande disparité à travers le territoire, tant dans leur organisation que dans leurs contenus. Une plus grande harmonisation et un cadre plus précis seraient souhaitables afin d’améliorer la cohérence et l’efficacité du dispositif.
Ce serait, par ailleurs, un élément de stabilisation et d’apaisement des équipes et surtout des élèves, dans une année charnière où l’anxiété générée par l’orientation est déjà conséquente.
Enfin, le développement de la mixité de publics, un peu partout sur le territoire, continue d’inquiéter voire de fragiliser nos collègues.
Le défi sur le plan pédagogique est immense et la gestion de classe est particulièrement difficile.
Le SE-Unsa rappelle son opposition au développement généralisé et non concerté de cette mixité. Les collègues subissent trop souvent cette réalité.
 
 
Un nouveau projet de réforme déconnecté et contre-productif
 
Malgré les inquiétudes et les difficultés sur le terrain et avant même que toutes les leçons aient été tirées de la TVP, le président, ministre de l’Éducation à ses heures, a déjà lancé l’idée d’une nouvelle réforme de la voie professionnelle en se rapprochant du "sacro-saint" modèle de l’apprentissage.
Les enseignants ont déjà beaucoup donné ; parfois sans les moyens, ni la formation, ni l’accompagnement nécessaire… La reconnaissance de leur investissement n’est pas au rendez-vous.
Comme le SE-Unsa le répète depuis de nombreuses années, l’apprentissage n’est pas un modèle que l’on pourrait dupliquer et adopter tel quel n’importe où. Il n’est adapté qu’à une petite partie de nos jeunes qui y trouvent un véritable épanouissement. Toutefois, il n’est certainement pas fait pour l’essentiel de nos lycéens qui ont besoin de l’accompagnement particulier en lycée professionnel et du savoir-faire singulier des PLP.
 
 
L’avis du SE-Unsa
 
L’enjeu est trop important pour se lancer dans des déclarations improvisées sans avoir pris l’avis des principaux acteurs.
Il s’agit de l’avenir de milliers de jeunes et de la formation de près de 200 000 bacheliers professionnels. Leur rôle dans le développement des métiers de demain est crucial ; ils sont une partie de la réponse aux défis que notre société aura à relever dans les prochaines décennies.
Pourtant, en haut lieu, on semble toujours considérer la voie professionnelle avec mépris, et ce malgré les promesses du président quant à un "changement de méthode"...
Le quinquennat précédent a été marqué par le déroulement d’une réforme lourde et exigeante sans l’apport des moyens nécessaires. Le déploiement de la TVP s’est effectué au pas de charge, selon le calendrier initial, sans tenir compte du contexte particulier lié à la situation sanitaire et aux difficultés rencontrées sur le terrain.
Le SE-Unsa exige le retour à un véritable dialogue social, respectueux de notre expertise et de la vision à long terme de l’éducation que nous portons.
Nous demandons une plus grande stabilité dans les politiques mises en œuvre en voie professionnelle.
Le sE-Unsa revendique des moyens à la hauteur des enjeux.