Renforcer l’anglais à l’école primaire : Much ado about nothing*

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Une circulaire ministérielle de décembre 2022 a pour objet l’enseignement de l’anglais et des langues vivantes étrangères tout au long de la scolarité obligatoire. Bien qu’elle présente plusieurs mesures spécifiques au primaire pour améliorer les apprentissages des élèves, la plupart d’entre elles ne pourront pas être mises en œuvre dans la majorité des écoles. Pour le SE-Unsa, c’est encore une fois une nouvelle priorité affichée sans que les professeurs des écoles aient les moyens de la concrétiser.
 
 
Des mesures pour des mesures
 
La circulaire ministérielle du 12 décembre 2022 est intitulée Mesures pour améliorer les apprentissages des élèves. Elle indique que le renforcement des compétences des élèves en anglais et dans les autres langues vivantes étrangères obligatoires est une priorité pédagogique du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse. 
 
Pour ce faire, des repères annuels de progression et des attendus de fin d’année complètent désormais les programmes. Ou plutôt, complèteront les programmes : à ce jour seuls des repères pour le cycle 4 apparaissent sur la page dédiée. Des fiches d’entraînement avec des items de positionnement et des ressources d’évaluation sont également mises à disposition.
 
Afin d’augmenter l’exposition à l’anglais et d’en permettre la pratique fréquente et régulière à l’école primaire, plusieurs mesures sont à promouvoir :
  • Faire intervenir des locuteurs natifs pour entraîner les enfants à la reconnaissance phonologique et prosodique.
     
  • Déployer les écoles bilingues pour offrir aux élèves un enseignement de matières intégré à la langue étrangère (Emile).
     
  • Au cycle 2, compléter son enseignement avec l’assistant vocal Captain Kelly, une ressource numérique permettant de travailler les connaissances lexicales et syntaxiques des élèves, et d’améliorer leur compréhension orale ainsi que leur prononciation en anglais.
     
  • Le dispositif Accueil langues est également à promouvoir, notamment dans le cadre du plan mercredi, pour favoriser le lien entre les temps scolaire et périscolaire. 
Pour le SE-Unsa, la question reste de savoir comment, ou encore avec quels moyens les mettre en œuvre.
 
 
Enfin, la circulaire propose de disposer d’au moins un partenariat avec un homologue étranger pour autant d’écoles que possible, et d’utiliser des plateformes européennes numériques d’échanges.
 
Pour le SE-Unsa, les professeurs des écoles se diront certainement en lisant ces propositions que c’est peine (d’amour) perdue. Les seuls éléments applicables à l’ensemble des écoles sont ceux que le ministère n’a pas encore publiés.
 
 
Le songe d’une nuit d’hiver
 
Il convient donc de rajouter la nouvelle priorité des langues vivantes étrangères dans les réflexions pédagogiques des équipes (certainement le soir ou la nuit puisque les emplois du temps des enseignants du 1er degré sont déjà surchargés). En effet, la formation linguistique des élèves et l’ouverture européenne et internationale doivent être réfléchies lors des instances pédagogiques de l’école (conseil d’école, conseil des maîtres, conseil de cycle 3). 
 
Les langues vivantes étrangères constituent une entrée systématique du projet d’école qui définit les orientations et les indicateurs privilégiés pour en suivre le bon développement. 
 
Mais peut-être que Tout est bien qui finit bien. Dans le cadre du Conseil national de la refondation dédiée à l’éducation (CNR école), les projets identifiés pour améliorer la formation des professeurs de langue, pour diversifier l’enseignement, pour enrichir les possibilités de mobilités, et pour accentuer l’ouverture internationale sont accompagnés et favorisés. Ces projets pédagogiques pourront solliciter un financement dans le cadre du fonds d’innovation pédagogique. C’est enfin un début de réponse aux besoins des équipes concernant les langues vivantes, mais qui est loin d’être suffisant.
 
 
L’avis du SE-Unsa
 
Pour le SE-Unsa, cette circulaire aurait pu s’intituler Beaucoup de bruit pour rien. Si la priorité aux langues vivantes étrangères est bel et bien affichée, cela est tout sauf suffisant. Il est indispensable de donner aux professeurs des écoles les moyens de mettre en œuvre ces enseignements dans de bonnes conditions. 
Pour cela il faut tout d’abord que le ministère mette à disposition les outils annoncés et qui ne sont pas encore publiés.
Ensuite, le ministère doit expliquer comment il compte procéder pour que les bonnes intentions décrites dans cette circulaire puissent être appliquées :
  • Améliorer la formation des enseignants, et donc ne plus se contenter des plans maths ou plans français ?
     
  • Ajouter des moyens de remplacement pour permettre la tenue de formations ?
     
  • Peser pour que des assistants de langue ou locuteurs natifs soient affectés dans le 1er degré ?
     
  • Inciter à l’ouverture d’écoles bilingues ?
     
  • Accompagner les équipes pour mettre en œuvre des partenariats et utiliser les plateformes numériques ?
C’est comme il vous plaira… Ou plutôt : As you like it !
 
 
Beaucoup de bruit pour rien