Après celle du lycée, une réforme du collège… ?

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Alors que le lycée général et technologique a connu sous la présidence d’Emmanuel Macron des bouleversements qui ont modifié profondément son organisation, le parti du candidat à sa réélection esquisse déjà ce que pourrait être un nouveau quinquennat et c’est le collège qui est en ligne de mire cette fois.
 
Dans une tribune du journal Le monde datée du 21 février, Anne-Christine Lang et plusieurs parlementaires de LREM proposent une réforme en profondeur du collège. Après qu’à peine arrivé au pouvoir, le parti présidentiel s’est évertué à détricoter la réforme du collège de 2015 du gouvernement socialiste précédent, c’est bien sur la transformation du lycée que l’essentiel des moyens et des forces ont été concentrés ces cinq dernières années. Or, en pleine campagne présidentielle, le collège fait son grand retour dans les débats.
 
Des propositions hors-sol
 
Réelles propositions ou propos isolés sans conséquences, l’expression de la députée de Paris sur le futur des collèges du territoire n’a pas manqué de faire réagir. Une liaison entre l’école primaire et le collège difficile, encore trop de décrochages, des inégalités qui se creusent, un climat scolaire qui se détériore etc, le constat n’est pas nouveau.
 
Pour cette élue, la cause principale à ces échecs serait une organisation qui ne permettrait pas que les apprentissages fassent sens chez les élèves. Trop de matières enseignées, trop d’enseignants, le collège ne serait qu’une copie du lycée. Aussi, l’idée serait de calquer son fonctionnement sur celui de l’école primaire et de rassembler les professeurs des écoles et des collèges dans un seul et même corps rendant ces derniers polyvalents. Les enseignants en collège seraient donc amenés à enseigner plusieurs disciplines à l’instar de leurs collègues du premier degré.
 
Pour Madame Lang et consorts, les vertus seraient nombreuses parmi lesquelles notamment d’augmenter la présence des enseignants dans les établissements ce qui, en lien avec la création d’internats, permettraient de travailler davantage sur des compétences socio-éducatives au-delà des compétences disciplinaires strico sensu. Selon elle, une telle organisation aurait pour résultante la création d’un collège modulaire, qu’elle appelle de ses vœux, capable de s’adapter au mieux au niveau des élèves.
 
Toutes ces propositions seraient mises en place dans les cités éducatives et dans les zones d’éducation prioritaire dans un premier temps avant d’être généralisées à l’ensemble du territoire.
 
À la recherche de la cohérence
 
En baissant le nombre d’élèves par classe, en offrant un équipement de qualité et en nombre suffisant sur tout le territoire, en intégrant des temps de concertation sur temps de service, en favorisant les formations interdegrés entre autre, le collège unique pourrait gagner en efficacité et répondre positivement aux critiques qui lui sont adressées sans qu’il y ait besoin de tout bouleverser.
 
Pour le SE-Unsa, il est clair que des liens forts doivent être consolidés entre l’école primaire et le collège. À ce titre, nous revendiquons la continuité éducative et demandons la mise en œuvre de réseaux pédagogiques du socle associant les écoles et le collège (dans toutes ses composantes : Segpa, Ulis, UPE2A…). C’est l’unité et le travail collectif qui redonnera du sens aux apprentissages. Nous avons toujours prôné l’interdisciplinarité comme colonne vertébrale des programmes.
 
Aujourd’hui, il est assez ironique de voir la majorité mettre en avant les avantages de la pluridisciplinarité quand la promotion des EPI, qui est une démonstration évidente d’une mise en relation des savoirs, a été détruite au profit d’options facultatives qui ne profitent surtout qu’aux élèves ayant les meilleurs résultats.
 
Quant au poids supposé trop lourd du disciplinaire dans le parcours des collégiens, là encore, on ne peut que s’interroger sur la cohérence des propos et des actions de LREM. L’accompagnement personnalisé, intégré aux horaires disciplinaires et pensé initialement pour, entre autre, développer la culture générale des élèves, ainsi que leurs potentiels et leurs talents particuliers a été plus que mal mené par le gouvernement actuel au bénéfice notamment du dispositif devoirs faits dont seuls les élèves qui le veulent en tirent parti et qui en plus fait que leur emplois du temps est alourdi. On est en droit, de plus, de trouver étonnant que les réseaux d’éducations prioritaires soient entrevus comme « des laboratoires à idées » servant de tests à la mise en place de ces propositions alors qu’on sait que les équipes au sein de ces établissements ont besoin de stabilité et de sécurité pour fonctionner.
 
Vers une baisse de l’attractivité du métier
 
On voit bien les économies que pourraient représenter de telles mesures en entraînant une diminution de facto du nombre d’enseignants dans les collèges. Or, la crise sanitaire l’a montré : la société a besoin de professeurs. Comment imaginer qu’on va résoudre la crise des vocations par une réforme aussi violente ? Quand on sait que les enseignants du 2d degré entrent dans le métier par un attachement et un lien particulier à leur discipline, une partie d’entre eux seraient privés du droit de l’enseigner au collège, mais pas au lycée. Tout ceci n’augure que découragement, démissions en série et baisse du nombre d’inscrits dans les concours de recrutement enseignant.
 
Pour le SE-Unsa, si le collège mérite une réforme, il ne mérite pas celle-là ; ni pour les élèves, ni pour les personnels.
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